
Histoire
Retour à la salle de presseLe soldat Albert George Pegram et la bataille du bois du Polygone

En 1917, alors en pleine Troisième bataille d’Ypres, les troupes de la force impériale australienne se retrouvent mobilisées quelques dizaines de kilomètres à l’est de la ville, proche de la ville de Zonnebeke, dans le bois du Polygone. Celles-ci se retrouvèrent à combattre sur un territoire quasi lunaire ; une étendue de cratères, parsemée de souches d’arbres à perte de vue.
La bataille de Polygon Wood reste dans la mémoire comme un succès militaire, au prix de la lourde perte de près de 5700 australiens, dont environ 4000 au sein de la 5eme Division AIF. Il s’agit de la deuxième de trois attaques majeures planifiées par le général britannique Herbert Plumer, 1er vicomte Plumer, avec la bataille de la route de Ménin et la bataille de Broodseinde.
Parmi les soldats de la 5e division, le soldat Albert Pegram (matricule 3204) qui servit dès l’âge de 18 ans au sein du 55e bataillon. Motivé à l’idée de retrouver ses amis et ses cousins servant déjà en France, il embarqua le 11 novembre 1916 depuis Sydney.
La troisième bataille d’Ypres était déjà bien engagée lorsque les 4e et 5e divisions australiennes se préparaient à l’attaque du bois du Polygone, Polygon Wood, le 26 septembre 1917. Ils étaient loin de se douter que la bataille du bois du Polygone allait devenir l’un des engagements les plus réussis pour les troupes australiennes.


Les précédentes tentatives de prise des lignes allemandes avaient été trop ambitieuses, et en conséquence, l’infanterie dépassait parfois la portée à laquelle sa propre artillerie pouvait la protéger des contre-attaques allemandes. Le terrain conquis était alors souvent perdu.
Plumer était un partisan de la tactique « bite and hold » (« mordre et tenir »). Cette tactique impliquait une courte avancée de l’infanterie derrière un barrage d’artillerie lourd, suivie d’un retranchement de l’infanterie sur la position gagnée, tandis qu’un barrage placé devant elle empêchait les Allemands de contre-attaquer. Une pause de plusieurs jours était prévue pour préparer la prochaine avancée, en permettant à l’artillerie d’avancer, et le processus était ensuite répété.
Cette bataille, en pleine 3eme bataille d’Ypres, était le premier engagement majeur de la 5e division depuis les terribles pertes subies à Fromelles en juillet 1916.
Ce jour-là, la 5e division, appuyée par les troupes Britanniques sur ses flancs, réussit à s’emparer des positions allemandes dans tout le bois, y compris la Butte de Polygone, un monticule artificiel utilisé par l’armée belge à la fin du 19e siècle pour s’entraîner au tir au fusil.
Ce terrain élevé occupait une position stratégique importante pour l’armée allemande, offrant une vue étendue et dominante sur les environs et bloquant les avancées alliées vers la crête de Passchendaele.
Peu après la prise du bois, le 55e bataillon consolida ses nouvelles positions et les étendit pour prévenir d’une contre-attaque allemande.
Bien que la prise réussie du bois du Polygone et de la Butte soit un moment de fierté pour la 5ème division, le prix à payer était élevé : 15000 pertes britanniques dont plus d’un tiers d’Australiens. La 5e division perdit près de 4000 hommes et la 4e division, qui attaqua aux côtés de la 5e division, en perdit environ 1700.
Le soldat Albert Pegram fait partie de ces hommes ; touché à l’estomac par un sniper allemand, il a été grièvement blessé alors qu’il sautait à travers une tranchée exposée avec sa section. Un de ses cousins qui se trouvait avec lui à l’époque a pu écrire à ses parents pour leur expliquer la terrible épreuve qu’il avait subie. Albert a été évacué vers le 17e poste d’évacuation des blessés près de Popperinge, où il est mort de ses blessures deux jours plus tard.


Albert est enterré au cimetière militaire de Lijssenthoeck, à l’ouest d’Ypres. La perte d’Albert a été dévastatrice pour sa famille, qui n’a jamais pu se rendre sur sa tombe. Son neveu est né le jour même de sa mort et porte son nom. Le père d’Albert ne s’est jamais pardonné d’avoir signé les papiers d’engagement de son fils et sa mère a été enterrée avec ses médailles de guerre et sa plaque commémorative.
Depuis 1919, le mémorial de la 5e division australienne se dresse sur la butte et donne sur le cimetière Buttes New British, niché dans le bois du Polygone. Les corps de 2000 soldats y furent amenés après la guerre, et presque 1700 d’entre eux n’ont jamais été identifiées.
« Dans sa tombe solitaire, il repose loin de tous ceux qu’il a tant aimés ».
